Aux commandes de la Banque Nationale depuis presque 13 ans, Louis Vachon était aux premières loges lorsque la crise financière de 2008 est survenue. Mais cette fois-ci, le portrait est bien plus complexe, selon le banquier de 57 ans.

La tempête économique actuelle a été provoquée par des raisons sanitaires ayant incité de nombreux pays à mettre leur économie sur pause afin de limiter la propagation de la COVID-19, plutôt que par des déséquilibres survenus sur les marchés financiers, a-t-il expliqué, vendredi, au cours d’une entrevue téléphonique en marge de l’assemblée annuelle des actionnaires qui se déroulait dans un format virtuel.

« Une deuxième crise n’est pas plus agréable que la première, mais pour celle-ci, il n’y a pas vraiment de précédent, a-t-il expliqué. Créer du confinement pour protéger la population avec l’impact économique que cela provoque, ça ne s’est pratiquement jamais fait. »

Ainsi, le président et chef de la direction de la Nationale estime que la reprise s’annonce difficile à prévoir, étant donné qu’elle sera essentiellement dictée par l’aspect sanitaire à travers le monde.

De plus, jusqu’à ce qu’il y ait un vaccin, les mesures de distanciation sociale vont demeurer en place, a fait remarquer M. Vachon, ce qui complique les prévisions entourant la cadence de la reprise. À l’heure actuelle, quelque 13 000 employés de l’institution financière font du télétravail alors qu’environ 6500 se trouvent dans les succursales encore ouvertes.

« Le livre de recettes n’est pas très développé pour cela et les impacts seront différents selon les régions et les secteurs d’activité, a dit le président de la sixième banque en importance au pays. Il y a des impacts sur nos employés, la communauté et nos actionnaires. »

D’après les plus récentes prévisions des économistes de la Nationale, le produit intérieur brut (PIB) du Canada pourrait se contracter de 4,8 % en 2020, ce qui « constituerait la plus forte chute annuelle enregistrée depuis 1961 ». Du côté québécois, le PIB devrait enregistrer un recul de 5,2 %. Aux États-Unis, l’activité économique devrait fléchir de 6 %.

M. Vachon n’a reçu qu’une question lors de l’assemblée virtuelle des actionnaires, soit bien moins que lors des rendez-vous annuels en personne. Interrogé sur l’impact financier de la pandémie sur la performance financière de la banque, celui-ci s’est limité à dire que le portrait serait plus clair vers la fin mai, lorsque seront dévoilés les résultats du deuxième trimestre de l’exercice.

Bonne réponse

Le banquier a par ailleurs estimé que la réponse de la Nationale avait été adéquate à l’égard de ses clients qui se retrouvent dans une situation financière plus précaire alors qu’ils sont privés de leur gagne-pain. À l’instar des autres institutions financières, la banque québécoise a abaissé les taux d’intérêt pour certains détenteurs de cartes de crédit et a offert des reports des paiements d’hypothèque, avec des intérêts qui continuent à courir.

Depuis le début de la crise, le secteur bancaire ainsi que les compagnies de cartes de crédit ont été interpellés afin d’abaisser les taux d’intérêt atteignant parfois plus de 20 %.

« La crise n’est pas terminée et avant de se donner des médailles et des notes, je crois qu’il faut attendre la fin de la crise », a répondu M. Vachon en entrevue.

Avec un portefeuille de prêts hypothécaires de 42 G$ par rapport à des soldes de cartes de crédit totalisant près de 2 G$, la Nationale a voulu mettre l’accent sur ce qui pesait le plus dans la balance, les hypothèques.

Pour M. Vachon, la structure du moratoire pour les versements hypothécaires protège à la fois le client et la banque même si les intérêts continuent à courir.

« Un prêt où l’intérêt court toujours est toujours considéré comme performant, a-t-il précisé. Donc je n’ai pas besoin de le déduire de notre capital. Cela nous permet d’en avoir assez pour soutenir d’autres particuliers et entreprises. »

Jusqu’à présent, 60 000 dossiers, 40 000 pour des hypothèques et 20 000 pour des prêts personnels, ont été traités en ce qui a trait à un report de paiement. Du côté des cartes de crédit, le paiement mensuel minimum accompagné d’une réduction temporaire du taux d’intérêt a été accepté dans 7900 cas.