L’année scolaire est déjà bien amorcée, et de nombreux parents attendent, ­peut-être avec un brin de nervosité, le premier relevé de notes de leurs enfants. Et si un 37 % y figure, gageons que ­ceux-ci passeront un mauvais quart d’heure.

Or, il s’agit exactement de la note un peu honteuse que les adultes canadiens ont décrochée au test de connaissance sur le système de retraite de l’Institut sur la retraite et l’épargne de ­HEC ­Montréal. S’ils étaient encore sur les bancs d’école, les quelque 3 000 ­Canadiens de 35 à 54 ans qui ont passé l’examen seraient probablement recalés… pour une troisième fois.

Lors de la première édition de l’étude, en 2019, les participants avaient obtenu une note de 36,5 %. L’année suivante, en 2020, de 38 %. C’est un euphémisme de dire que les progrès ne sont pas flagrants.

En quoi cela ­concerne-t-il les employeurs ? ­De tous les thèmes abordés par le test (RRQ, ­Sécurité de la vieillesse, ­REER, etc.), ce sont les régimes de retraite complémentaires qui donnent le plus de fil à retordre aux ­Canadiens. À cette section de l’examen, ils ont obtenu une note d’à peine 26 %, incapables de faire la différence entre un régime à prestations déterminées et un régime à cotisation déterminée.

Si le système scolaire a certainement un rôle à jouer dans l’amélioration des connaissances financières générales de la population, il revient en premier lieu aux employeurs de s’assurer que leurs employés comprennent bien le régime de retraite qui leur est offert. Plusieurs études ont démontré qu’un niveau de littératie financière plus élevé est associé à un meilleur revenu à la retraite, à des rendements supérieurs sur les placements et à une participation plus grande aux régimes de retraite d’employeurs.

Les employés moins à l’aise sur les questions d’argent tendent aussi à être plus stressés, ce qui nuit à leur productivité. Les employeurs ont donc tout intérêt à être certains que leurs employés comprennent bien les principes généraux du régime de retraite en place et sachent quels gestes poser pour en tirer profit au maximum.

Cela dit, les programmes d’éducation financière en milieu de travail ne devraient pas être une excuse pour transférer aux employés encore plus de responsabilités liées à la planification de la retraite. La conception même des régimes a sans doute bien plus d’effets sur la sécurité financière à la retraite des participants que leur niveau de connaissances financières.

L’industrie des régimes d’accumulation de capital l’a d’ailleurs bien compris. Que ce soit en implantant l’adhésion automatique dès l’embauche, en proposant un choix de placement par défaut performant ou même en augmentant automatiquement le taux de cotisation des employés au fil des ans, les régimes d’accumulation modernes visent à limiter le nombre de décisions que les participants doivent prendre. Même si cela peut sembler un peu ­contre-intuitif, c’est de cette façon qu’ils ont les meilleures chances de vivre une retraite confortable.

Ce constat est particulièrement vrai en ce qui concerne les placements, domaine éminemment complexe où vaut mieux laisser les décisions entre les mains des experts. Un rapport de ­Sun ­Life publié en début d’année révélait par exemple que les participants de régimes de capitalisation investis uniquement dans des fonds à date cible (l’option par défaut de la très grande majorité des régimes) ont obtenu un rendement annualisé moyen de 6,0 % entre 2014 et 2018, comparativement à 5,1 % pour les participants investis uniquement dans des fonds à la carte.

Le rapport n’aborde pas le niveau de connaissances financières des participants, mais on peut raisonnablement penser que ceux qui ont pris la peine de sélectionner un à un leurs fonds ne sont pas ceux qui ont (ou qui croient avoir) les plus faibles connaissances en investissement.

Une étude de ­Morningstar parue en 2019 concluait même que les régimes ­CD qui offrent une vaste sélection de fonds à la carte enregistrent de meilleurs rendements. Pas parce que cela permet aux participants de se construire un portefeuille plus diversifié, mais plutôt parce que cela sème la confusion et incite les participants à… ne prendre aucune décision. Ce faisant, leur actif est automatiquement investi dans le fonds à date cible par défaut, la solution optimale pour eux.

Pour obtenir une meilleure note au test de l’an prochain, les épargnants devront être un peu plus studieux en matière de retraite. Mais les employeurs devraient de leur côté faire en sorte que leur régime soit un premier de classe. Car un participant qui connaît la différence entre un régime ­PD et un régime ­CD, c’est bien, mais un régime qui lui assure une sécurité financière à la retraite, peu importe son niveau de connaissances financières, c’est bien mieux.


• Ce texte a été publié dans l’édition de septembre 2021 du magazine Avantages.
Vous pouvez également consulter l’ensemble du numéro sur notre site Web
.