La possibilité que Québec rende conditionnelle à la situation dans les autres provinces le fait d’interdire les régimes de retraite à deux vitesses a fait sursauter, jeudi, dans le milieu syndical. Et cette question des clauses de disparité de traitement a rebondi à l’Assemblée nationale.

Le quotidien La Presse a rapporté, jeudi, qu’un rapport sur lequel la ministre du Travail doit se baser pour sa réforme recommande bel et bien de mettre fin à ces clauses de disparité de traitement, mais seulement si les autres provinces font de même.

Cette question des régimes de retraite à deux vitesses touche également les régimes d’assurances collectives. Il s’agit de clauses, dans les contrats de travail, qui permettent aux employeurs d’offrir des conditions moins généreuses aux employés embauchés après une date donnée.

Comme le salaire minimum?

Au cours d’une entrevue avec La Presse canadienne, jeudi, le secrétaire général de la FTQ, Serge Cadieux, s’est dit estomaqué devant cette idée de rendre l’interdiction de telles clauses discriminatoires conditionnelle au fait que les autres provinces fassent de même.

« C’est absurde! Le Québec est souverain en matière de travail; il n’a pas à attendre après les autres provinces avant d’interdire une clause de disparité de traitement. Est-ce qu’on va augmenter le salaire minimum à 15 $ l’heure demain? Parce que l’Ontario a annoncé hier qu’elle allait hausser le salaire minimum à 15 $; la Colombie-Britannique fait la même chose et l’Alberta fait la même chose », s’est-il exclamé.

Il a rappelé que lorsque le gouvernement du Québec a interdit les clauses de disparités de traitement pour les salaires, par exemple, il n’a pas attendu que les autres provinces fassent de même. Pourquoi attendre les autres provinces pour les interdire pour les régimes de retraite? demande-t-il.

La plus grande centrale syndicale du Québec, qui a plus de 600 000 membres, se bat depuis des années pour que le recours à de telles clauses discriminatoires soit interdit. Les jeunes du Parti libéral du Québec s’opposent également à de telles clauses, de même que d’autres groupes de jeunes et la plupart des partis politiques.

Les 1030 syndiqués de l’aluminerie ABI à Bécancour viennent justement de se doter à 97 % d’un mandat de grève. Et l’enjeu principal est précisément l’implantation d’un tel régime de retraite à deux vitesses.

Les employeurs, de leur côté, disent recourir à de telles clauses pour réduire les coûts croissants que représentent les régimes de retraite et d’assurances collectives.

La question a rebondi à l’Assemblée nationale, jeudi matin.

« Est-ce que la ministre du Travail va devoir faire un road trip à travers le Canada pour convaincre l’ensemble des autres homologues provinciaux pour qu’on le fasse ici avant? L’injustice, elle est au Québec, ce n’est pas sérieux comme explication », a lancé le député Gabriel Nadeau-Dubois, de Québec solidaire.

La ministre du Travail, Dominique Vien, a dit vouloir donner « plus de temps aux familles et aux citoyens » dans le cadre de sa réforme de la Loi sur les normes du travail, qui inclut aussi les agences de placement de main-d’œuvre.

« Ce sont des sujets qui sont au cœur des réflexions que nous menons, mais des actions aussi que nous menons actuellement », a ajouté la ministre Vien.