Salée ou pas, la facture du Québec pour les médicaments risque d’être plus élevée après la ratification de l’Accord États-Unis-Mexique-Canada (AEUMC). C’est pourquoi Ottawa devrait lui offrir une indemnisation, selon le Bloc québécois.

« C’est Ottawa qui a décidé de signer cette nouvelle entente-là qui va occasionner des dépenses additionnelles pour le Québec, alors la moindre des choses, c’est qu’il y ait une compensation équivalente », a exigé le député Gabriel Ste-Marie.

Le nouvel accord de libre-échange étendra la durée de protection des données de huit à dix ans pour les médicaments biologiques, ce qui veut dire que les compagnies pharmaceutiques auront l’exclusivité du marché deux ans de plus avant que des médicaments biosimilaires viennent leur faire concurrence.

« La question c’est de déterminer quel va être ce coût-là », a indiqué le professeur en politiques publiques de l’Université Carleton à Ottawa, Marc-André Gagnon.

Il pourrait être plus ou moins important selon les produits qui seront touchés. Les médicaments biologiques sont fabriqués à partir d’organismes vivants comme des bactéries.

« C’est une espèce de nouvelle catégorie de médicaments qui est entrée sur le marché depuis une dizaine d’années, a-t-il expliqué. En ce moment, si on prend les dix médicaments les plus vendus au Canada, sept des dix médicaments sont des biologiques. »

Entrent dans cette catégorie certains remèdes pour traiter l’arthrite rhumatoïde comme le Remicade et le Humira.

Pas de chiffres officiels

Il est difficile pour l’instant de savoir combien d’argent cette disposition de l’AEUMC coûterait annuellement au Québec puisque le gouvernement fédéral n’a pas offert de chiffres.

« C’est 20 % plus longtemps, 20 % plus cher. C’est sûr que ça ne sera pas des pinottes », a fait valoir Gabriel Ste-Marie.

« Une hausse du prix des médicaments, ça a un impact direct sur le budget du gouvernement du Québec », a souligné la députée néo-démocrate Brigitte Sansoucy.

« Le gouvernement Trudeau, qui vient de signer l’AEUMC, doit nous dire clairement ça va être quoi les impacts au Canada, ça va être quoi l’impact pour les provinces », a-t-elle ajouté.

Les néo-démocrates demandent un programme national d’assurance médicaments.

Le chef conservateur Andrew Scheer, pour sa part, a accusé le gouvernement Trudeau d’avoir cédé aux pressions américaines sur les produits pharmaceutiques, une décision qui coûtera « des milliards de dollars de plus aux Canadiens ».

La ministre fédérale de la Santé, Ginette Petitpas Taylor, avait reconnu mardi que l’AEUMC « pourrait avoir un impact sur le prix des médicaments », en ajoutant du même souffle que son gouvernement travaillait depuis deux ans à le faire diminuer.

« C’est un peu tôt pour parler d’indemnisation pour le coût des médicaments, a-t-elle offert mercredi. Nous allons continuer à travailler avec les provinces et les territoires pour nous assurer que les prix des médicaments pour les Canadiens soient abordables. »

Elle soutient que des économies de plus d’un milliards de dollars ont été réalisées depuis qu’Ottawa a joint l’Alliance pancanadienne pharmaceutique en 2016. Il s’agit d’un regroupement des régimes publics d’assurance médicaments pour négocier les prix.

Promesse abandonnée ?

Le gouvernement Harper avait promis en 2013 de compenser les provinces après la signature de l’Accord Canada-Union européenne pour la hausse du coût des médicaments. Cet accord étendait aussi la protection des droits de propriété intellectuelle de deux ans pour les produits pharmaceutiques.

Le directeur parlementaire du budget a estimé en avril dernier que cette mesure coûterait 49,3 M$ de plus annuellement au Québec.

Une source gouvernementale a affirmé en soirée mercredi que cet engagement existe toujours, mais que les coûts réels de la hausse seraient chiffrés plus tard, lorsqu’elle entrerait en vigueur.

Le régime public d’assurance médicaments, qui couvre 3,6 millions de Québécois, coûte annuellement 4,6 G$, selon les plus récentes données de la Régie de l’assurance maladie du Québec.