Comment les produits dérivés trouvent-ils leur place dans les stratégies de répartition des caisses de retraite au Canada? C’est sur cette question que s’est penché Jason Taylor, CAIA, directeur principal, Dérivés sur revenu fixe, TMX | Bourse de Montréal, à l’occasion du dernier midi-conférence de L’Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite (ACARR).

Selon M. Taylor, les produits dérivés devraient entrer en ligne de compte autant dans la gestion du portefeuille (pour rééquilibrer le passif, distribuer l’encaisse ou s’exposer à un actif, par exemples) que dans la gestion de risque (pour soutenir des stratégies de couverture ou d’investissement guidé par le passif, notamment) ou dans la mise en place de stratégies visant à générer de la valeur (dans une vente d’options d’achat couvertes, par exemple).

M. Taylor considère que le recours aux produits dérivés dans l’établissement des stratégies de rééquilibrage des portefeuilles de caisses de retraite offre les avantages suivants :

  • Un bon rapport coût-efficacité
  • Une efficacité opérationnelle
  • Une bonne liquidité

Exemple de stratégie
Pour illustrer ces avantages, M. Taylor a proposé à l’auditoire du midi-conférence l’exemple suivant de stratégie de rééquilibrage du portefeuille d’une caisse de retraite, entre les périodes usuelles de rééquilibrage, pour faire face à la turbulence actuelle des marchés qui affecte particulièrement la partie détenue en actions.

Situation: Une caisse de retraite détient un milliard de dollars d’actifs répartis selon la pondération suivante :

Répartition initiale ($)Répartition initiale (%)
Actions400 000 000 $40%
Revenu fixe400 000 000 $40%
Alternatif150 000 000 $15%
Encaisse50 000 000 $5%

Affectée par une turbulence des marchés, la pondération en actions perd 7,5 % avant la période usuelle de rééquilibrage.

Nous supposons que les rendements des titres à revenu fixe et des actifs alternatifs sont respectivement de 3,75 % et de 10 %, pour conserver la même valeur globale du portefeuille.

La pondération intra-mois devient la suivante :

Répartition intra-mois ($)Répartition intra-mois (%)Écart de la cible
Actions370 000 000 $37,00 %-3,00 %
Revenu fixe415 000 000 $41,50 %1,50 %
Alternatif165 000 000 $16,50 %1,50 %
Encaisse50 000 000 $5,00 %0,00 %
Total 1 000 000 000 $ 100 % 0,00 %


Objectif :
La politique de la caisse demande que la pondération des actifs soit rééquilibrée quand le poids dépasse 2,5 % de leur cible. Dans ce cas-ci, la partie en actions doit être ajustée de 30 $M (pour atteindre la cible de 40 %). La répartition demande de répliquer l’indice S&P/TSX 60.

Deux options s’offrent donc au gestionnaire :

  1. Achat de contrats à terme
    Pour atteindre le montant de 30 $M, le gestionnaire doit acheter 221 contrats SXF (on suppose que l’indice vaut 680). Supposons un frais de transaction de 5 $ (incluant l’exécution, la compensation, la réglementation, et la commission) et un écart de 40 $ entre l’offre et la demande par contrat, ce qui équivaut à 9 945 $ pour mettre en place la stratégie, ou 3,32 points de base pour 30 $M. Dans ce cas, la marge initiale pour les contrats à terme est financée par le comptant (ici, on demande une marge initiale de 1,6 $M).
  2. Achat d’actions répliquant l’indice S&P/TSX60 :
    Pour atteindre l’exposition de 30$M avec les composants de l’indice S&P/TSX 60, il faudra acheter 919, 296 actions. On suppose des frais de commission de 0,008 $ l’action, avec un écart entre l’offre et la demande de 1 point de base avec des frais de gardien des valeurs de 5 $ l’action, pour une stratégie dont le coût total est de 16 847 $ ou 5,62 points de base pour 30 $M. Le comptant demandé pour acheter les actions est pris dans l’encaisse de la caisse. Si des actifs doivent être vendus, ou de l’argent doit être financé, le coût total de la stratégie augmentera encore.

Résultat : En utilisant une stratégie avec des contrats à terme, la caisse a économisé 41 %. En plus de l’avantage monétaire, cette stratégie entraîne moins de risque opérationnel, est facile à implanter et demande moins de ressources financières.