Les députés brésiliens ont adopté la semaine dernière une controversée réforme du système de retraite qui prévoit notamment l’instauration d’un âge minimum pour le versement des prestations.

Actuellement, le Brésil est un des rares pays du monde à n’exiger aucun âge minimum de départ à la retraite. Les femmes peuvent toucher leur pleine rente après 30 ans de cotisation, et les hommes, après 35 ans. Les Brésiliens qui demeurent sur le marché du travail plus longtemps bénéficient cependant de prestations bonifiées.

Le projet de réforme prévoit l’établissement d’un âge minimal de 62 ans pour les femmes et de 65 ans pour les hommes, rapporte l’AFP. Une période de cotisation de 40 ans sera également exigée pour toucher les prestations sans pénalité, bien que cette période puisse varier selon les professions.

La réforme vient aussi mettre fin aux privilèges accordés à certains salariés, en particulier aux hauts cadres de la fonction publique. Cette dernière disposition a d’ailleurs permis au projet de réforme de fédérer des députés à gauche comme à droite.

Le gouvernement brésilien estime que cette réforme lui permettra de soulager les finances publiques de 1000 milliards de réais (environ 343 G$ CAN) annuellement. Le gouvernement d’extrême droite dirigé par Jair Bolsonaro a fait de cette réforme du système de retraite le pilier central de son virage vers une économie plus libérale.

Celui-ci prévoyait une « catastrophe » si la réforme n’était pas adoptée. Alors que la population brésilienne vieillit rapidement, les caisses de retraite du pays ont accumulé un déficit d’environ 122 G$ CAN, ce qui représente 5,5 % du PIB.

Une réforme critiquée

Peu après le vote en chambre, le président Jair Bolsonaro a écrit sur Twitter que « le Brésil se rapproche de plus en plus de la voie de l’emploi et de la prospérité ». Pour autant, la réforme du système de retraite soulève l’ire du Parti des travailleurs, qui estime qu’elle va accroître les inégalités en frappant les travailleurs et les retraités les plus pauvres, dont les femmes noires, les travailleurs ruraux et les enseignants.

« C’est une réforme cruelle, injuste, inepte et inutile. Le problème n’est pas un problème de dépenses, c’est un problème de collecte, et cette réforme protège les riches », a regretté la députée du Parti des travailleurs Margarida Salomao, à l’AFP.

La réforme ne convainc pas plus Alberto Ramos, directeur de la recherche économique pour l’Amérique latine chez Goldman Sachs. « Il n’y a pas vraiment de quoi se réjouir. La réforme est positive mais elle n’est pas excellente. Elle maintient beaucoup de privilèges et n’est qu’un emplâtre sur un système en faillite. D’ici cinq ou dix ans, une nouvelle réforme sera nécessaire », a-t-il affirmé en entrevue avec Le Monde.

Environ 47 % des Brésiliens approuve les changements apportés au système de retraite, selon un sondage de la firme Datafolha.

Avant d’entrer en vigueur, le projet de réforme devra faire l’objet d’un second vote à la chambre des députés, puis obtenir l’appui du sénat.