Selon une nouvelle étude rendue publique par l’Association canadienne du médicament générique (ACMG), les changements demandés par l’Union européenne (UE) au régime canadien de propriété intellectuelle pour les entreprises pharmaceutiques, dans le cadre des négociations pour un accord de libre-échange, augmenteraient de près de 2,8 milliards de dollars par an le coût des médicaments d’ordonnance au Canada, dont 773 millions pour le Québec uniquement.

Ces augmentations de coûts seraient assumées principalement par les gouvernements des provinces, qui gèrent les programmes publics d’assurance médicaments, ainsi que par les entreprises et leurs employés qui cotisent à des régimes d’assurance collective.

Cette étude, intitulée Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne : évaluation de l’impact économique des dispositions proposées concernant la propriété intellectuelle dans le secteur pharmaceutique, a été réalisée par deux chercheurs canadiens de renom dans le domaine des politiques à l’égard du secteur pharmaceutique. Il s’agit d’Aidan Hollis, professeur au département de sciences économiques de l’Université de Calgary, et de Paul Grootendorst, professeur à la Faculté de pharmacie de l’Université de Toronto. L’étude a été commandée par l’ACMG.

Le Canada et l’UE négocient actuellement les termes d’un Accord économique et commercial global (AECG) que le ministre du Commerce international, Peter Van Loan, espère voir se conclure d’ici la fin 2011.

La mise en marché des médicaments génériques
serait retardée
Dans le cadre de ces négociations, l’UE a fait des propositions qui auraient pour effet de prolonger considérablement la période d’exclusivité de marché pour les médicaments de marque au Canada. Selon les auteurs de l’étude, s’il les accepte, le Canada « offrirait la plus longue protection structurelle pour les médicaments innovateurs de tous les pays du monde ».

Les auteurs de l’étude démontrent que, si elles étaient acceptées et mises en œuvre, ces propositions retarderaient de trois ans et demi en moyenne la mise en marché de médicaments génériques vendus à une fraction du prix de leur équivalent d’origine.

Le coût : huit fois supérieur au bénéfice

L’étude révèle aussi que les changements proposés par l’UE n’augmenteraient pas significativement les dépenses d’investissement des fabricants de médicaments de marque au Canada. Pourtant, l’objectif d’exclusivité offerte à ces fabricants est justement de les inciter à faire de la R-D pour la découverte de nouveaux traitements. Or, les investissements additionnels pour l’innovation pharmaceutique qui découleraient des changements proposés par l’UE ne représenteraient qu’une petite fraction des coûts supplémentaires que les Québécois et les Canadiens auraient à débourser.

Jim Keon, président de l’ACMG, souligne que les produits pharmaceutiques figurent au premier rang des exportations de l’UE vers le Canada, représentant 15,6 % du total de ces exportations et plus de 5 milliards de dollars annuellement.

« L’industrie pharmaceutique générique appuie les efforts du gouvernement du Canada pour accroître les échanges commerciaux et économiques avec les autres pays », a dit M. Keon. « Par contre, ces propositions de l’UE n’élimineront aucune barrière commerciale. Au contraire, les produits pharmaceutiques venant de l’UE bénéficient déjà d’un accès libre et sans entrave au marché canadien. Les propositions de l’UE auraient simplement pour effet d’augmenter les profits de compagnies pharmaceutiques de marque aux dépens du système de santé canadien ».