Marc Parent, pharmacien au Centre hospitalier universitaire de Québec (CHU de Québec – Université Laval). Photo : James Wagner.

Les médicaments biosimilaires peinent à s’imposer sur le marché canadien, alors qu’ils sont bien implantés en Europe. Malgré les nombreuses études démontrant qu’ils sont aussi efficaces que les médicaments biologiques, des craintes subsistent au pays.

« La sage prudence dont on a fait preuve lors de l’arrivée des biosimilaires il y a une dizaine d’années s’est transformée en crainte », indique Marc Parent, pharmacien au Centre hospitalier universitaire de Québec (CHU de Québec – Université Laval).

Le principal argument en faveur des médicaments biosimilaires est bien évidemment économique : beaucoup moins chers que les médicaments biologiques de référence, ils permettent de traiter plus de patients avec le même budget.

Les modèles de remboursement des biosimilaires varient selon les juridictions. Au Québec, le régime public rembourse uniquement la version biosimilaire d’un médicament biologique pour les patients naïfs, sauf exception. Toutefois, pour les patients qui prennent déjà un agent biologique, celui-ci continuera d’être remboursé.

La Colombie-Britannique a récemment décidé d’aller plus loin en imposant les biosimilaires pour tous les patients. « Cela soulève le fait que la Colombie-Britannique a conclu que le risque était relativement faible », fait remarquer Marc Parent, en ajoutant que des projets pilotes visant à privilégier les biosimilaires sont en cours chez certains assureurs.

La résistance à leur adoption massive provient de plusieurs milieux. Les fabricants de médicaments biologiques veulent protéger leurs parts de marché, alors que les médecins sont inconfortables à l’idée de se faire imposer des décisions financières au dépend de leurs décisions cliniques. « On peut comprendre les cliniciens d’être hésitants à modifier la prescription d’un patient qu’ils ont mis du temps à stabiliser. Pourquoi changer quand ça va bien? », note-t-il.

Les enjeux liés aux programmes de soutien aux patients offerts par les fabricants de médicaments biologiques entrent aussi dans l’équation. « Les biologiques et les biosimilaires ne sont pas seulement des médicaments. Ce sont des programmes clé en main dans lesquels les patients sont pris en charge, explique Marc Parent. Changer de médicament, ça veut dire de changer d’intervenants et de clinique de perfusion lorsque le produit s’injecte par voie intra-veineuse. Ça peut être très insécurisant pour les patients », dit-il, en concédant que pour les fabricants, les programmes de soutien aux patients constituent des programmes de fidélisation de la clientèle.

Cela étant dit, l’Organisation mondiale de la santé et l’Agence européenne des médicaments soutiennent que les biosimilaires sont aussi sûrs et efficaces que les médicaments biologiques. D’ailleurs, il y a très peu de cas documentés où le passage d’un biologique vers un biosimilaire a été problématique. En revanche, aucune étude n’a encore été menée sur le passage d’un biosimilaire vers un autre biosimilaire. « C’est un problème pour lequel il n’y a pas de réponse scientifique en ce moment », mentionne Marc Parent.

« Malgré le fait que l’efficacité et la qualité des biosimilaires a été scientifiquement démontré, la croissance demeure lente au pays. Il ne faudrait pas tomber dans une situation où le Canada serait abandonné par les fabricants de biosimilaires », conclut le pharmacien.