Le gouverneur de la Banque du Canada, Stephen Poloz, a recommandé mardi aux régimes de retraite de s’habituer à ce que les taux d’intérêt dits « neutres » soient dorénavant plus bas qu’ils ne l’étaient avant la crise financière.

À l’occasion d’un discours qu’il prononçait devant un auditoire de Wall Street, M. Poloz a indiqué que même si le sort des taux neutres – soient les niveaux qui prévaudront une fois que l’économie mondiale aura repris son erre d’aller – restait incertain, il était quasiment certain qu’ils seraient plus faibles qu’on ne l’a prévu précédemment.

Le gouverneur de la banque centrale canadienne a fait ce commentaire lors d’une séance de questions et réponses qui suivait un discours sur la croissance du commerce mondial.

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M. Poloz a notamment expliqué ce recul des taux neutres par la détérioration des perspectives pour le potentiel de la croissance économique mondiale à long terme. Cette prévision a été révisée à 3,2 %, comparativement à 4,0 % précédemment.

« Cette révision à la baisse signifie que le taux d’intérêt neutre sera certainement plus faible – pour une très longue période », a affirmé M. Poloz, ajoutant qu’il pourrait reculer encore davantage si les « vents contraires » économiques devaient se poursuivre. « Ceux qui œuvrent au sein des régimes de retraite doivent s’y habituer. Ils doivent s’adapter. »

Depuis la crise financière mondiale de 2008, les régimes de retraite ont dû jongler avec l’incertitude des marchés, la faible croissance et des taux d’intérêt à des creux records.

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Les régimes de retraite utilisent les taux d’intérêt à long terme pour calculer leurs engagements. Plus les taux sont faibles, plus les régimes ont besoin d’argent pour s’assurer d’être capable de verser leurs prestations futures.

Dans un rapport publié en décembre, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) affirmait que les conditions « suscitent des doutes quant à la capacité des régimes à cotisations définies et des systèmes de versement de rentes à fournir des pensions d’un niveau approprié ».

Pour protéger l’économie canadienne des chocs liés au plongeon des prix des ressources naturelles, M. Poloz a réduit le taux d’intérêt directeur de la Banque du Canada à deux reprises l’an dernier, pour le ramener à 0,5 % – ce qui n’est que légèrement supérieur à son creux historique de 0,25 %.

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M.Poloz a relié la vigueur des taux neutres du passé au baby-boom, qu’il a décrit comme une période de 50 ans de plus forte participation à la population active, et à une plus forte croissance.

« Eh bien, c’est derrière nous », a laissé tomber M. Poloz devant l’Association canadienne du commerce des valeurs mobilières et la Securities Industry and Financial Markets Association.

« Nous n’avons pas les chiffres pour tout cela, mais il faudra effectuer des tests à partir de divers scénarios pour les régimes de retraite et pour les besoins des clients, parce que les rendements ne seront tout simplement pas là. »

Mais compte tenu du niveau d’imprévisibilité, M. Poloz affirme qu’il est toujours possible que les vents contraires actuels se convertissent en forces positives qui pourraient faire grimper les taux d’intérêt à des « niveaux plus normaux » comme ceux qui précédaient la crise.

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