Addenda Capital fête ses dix ans. La spécialiste québécoise complète une décennie au cours de laquelle son actif sous gestion a été multiplié par 50 dans un univers, celui des titres à revenu fixe, où, dit-on, il est difficile de battre l’indice et d’apporter une valeur ajoutée. Addenda a fait le pari de la gestion active. Elle a réussi.

De 536 millions de dollars en 1996, l’actif sous gestion dépasse désormais les 26 milliards de dollars. Cette croissance exponentielle fait d’Addenda Capital le dixième plus important gestionnaire institutionnel au Canada, le premier dans l’univers des titres à revenu fixe. «Il y a dix ans, mon principal outil de travail était le ciseau. Et mon plus grand risque était celui de perdre le coupon entre mon bureau et la banque», lance Carmand Normand. Aujourd’hui, tout est plus sophistiqué. Il y a cette nécessaire ouverture à l’international, élargie par l’élimination du plafond de 30% au contenu étranger, alors que le passif des caisses de retraite est en dollars canadiens. Il y a aussi les obligations d’entreprise, les fiducies de revenu, les obligations de pacotille et les modes du type fonds de couverture. «Le métier fait appel à tellement de compétences, à beaucoup de spécialités que je ne possède pas», constate-t-il.

Le pionnier de la gestion active de portefeuilles à revenu fixe compte une quarantaine d’années d’expérience. Spécialiste de la gestion selon la durée depuis 1985, il a fondé sa firme en 1996 autour de deux gestionnaires. Aujourd’hui, ce nombre est passé à 18, dont six uniquement dans le segment des obligations d’entreprise. «Même privée, nous fonctionnions avec une structure de société ouverte», ajoute-t-il, en rappelant que, à l’origine, Addenda, qui ne comptait pourtant que cinq employés, était coiffée d’un conseil comptant dix administrateurs. «Je pouvais bénéficier d’une expertise, d’un output extérieur.»

Addenda n’a donc pas eu à s’adapter lorsqu’elle a complété son premier appel public à l’épargne en décembre 2004. Et cette ouverture du capital lui sert très bien en ces lendemains de Norbourg et autres Norshields de ce monde. «Nous sommes entièrement transparents. Nous avons des comptes à rendre avec la Bourse, avec l’Autorité des marchés financiers, avec les comités de retraite. Sans oublier notre code d’éthique et nos propres contrôles internes, une nécessité pour une firme qui peut négocier 40 ou 50 milliards de dollars par année.»

«Nous sommes tellement examinés. Les caisses de retraite effectuent une vérification diligente rigoureuse», renchérit Benoit Durocher. Celui qui est président et chef de l’exploitation d’Addenda depuis 2003 s’est vu confier de nouvelles responsabilités. Depuis octobre, il assume le rôle de chef de la direction. Carmand Normand a donc pris plus de distance pour conserver des fonctions de président exécutif du conseil d’administration. «J’ai désormais deux employés: Benoit et Yves», résume le fondateur. Yves Fontaine est premier vice-président et chef de l’investissement. Benoit Durocher a quitté ses fonctions d’économiste principal à la Banque Royale pour entrer chez Addenda en novembre 1997 à titre d’économiste et de gestionnaire. Addenda venait alors de franchir la barre du milliard de dollars d’actif sous gestion. La suite des choses est une histoire de rendement et de compétence de l’équipe.

À titre d’illustration, on retient que le fonds Addenda Obligations a dégagé un rendement annuel de 9,1% au cours de la période de cinq ans terminée le 31 décembre 2004, ce qui le situait au 7e rang des 60 fonds composant l’univers Morneau Sobeco. «Lorsque le taux d’intérêt moyen est de 4% et que les exigences du passif imposent aux caisses de retraite de faire du 7%, on peut mieux saisir l’importance de la performance de la composante à revenu fixe, qui représente la partie dite sécuritaire des portefeuilles», souligne Benoit Durocher.

Addenda a été un précurseur de la gestion active de titres à revenu fixe. «Nous gérons de la durée, du long et du court terme. Mais surtout, nous achetons de la valeur et nous rappelons aux caisses de retraite que le temps est leur principal atout.»

Addenda Capital est devenue un gestionnaire pancanadien, avec 35% de son actif sous gestion hors-Québec(dont 30% en Ontario). Ce déplacement est-ouest a été accéléré avec l’ouverture d’un bureau à Toronto. «D’autres bureaux vont suivre dans l’axe est-ouest. Puis dans l’axe nord-sud», précise Benoit Durocher.

«Nous allons toutefois faire nos devoirs avant de percer le marché des États-Unis et examiner plusieurs avenues ou filières», a-t-il ajouté, en mettant en exergue le fait que le style de gestion basé sur la durée n’est pas répandu au sud de la frontière.