Vous êtes dirigeant ou responsable des ressources humaines d’une PME ? Alors on vous a sans doute déjà contacté pour vous parler de l’urgence de mettre en place un régime de retraite pour vos employés. Ignorez ces campagnes de peur non fondées, et prenez plutôt le temps d’étudier la question.

RVE-quoi ?

Le régime volontaire d’épargne-retraite (RVER) est un nouveau produit financier, similaire à un régime enregistré d’épargne-retraite (REER) collectif, que le gouvernement du Québec s’apprête à lancer officiellement. En effet, rien – hormis des élections anticipées – ne semble plus empêcher l’adoption de la loi le constituant, laquelle surviendra quelque part cet automne.

Le RVER comme tel n’est assurément pas une révolution. De fait, nombreux sont ceux (dont moi) qui ne voient pas l’utilité d’un nouveau produit financier – d’autant plus que les nombreux existant déjà sont fortement sous-utilisés. La nouveauté, qui affectera de très nombreuses PME, réside dans certaines des dispositions actuellement prévues entourant le RVER, et visant à encourager la participation et l’épargne des travailleurs :

  • Tout employeur ayant cinq employés ou plus avec un an d’ancienneté devra obligatoirement offrir à ces derniers la possibilité d’épargner pour la retraite par retenues salariales dans un régime collectif.
  • Ces employés devront être automatiquement inscrits à un RVER et épargner un pourcentage de leur rémunération (par défaut, le taux de cotisation prévu pour l’instant se chiffrera à 2 % au départ) que l’employeur devra prélever sur la paie.
  • Pour se désister, les employés visés devront activement intervenir s’ils ne désirent pas épargner pour la retraite – d’où le « volontaire » dans son nom.
  • L’employeur n’aura pas l’obligation de contribuer à l’épargne de l’employé, mais y sera encouragé (sans nouvel incitatif financier ou fiscal, cependant).

Si vous n’offrez pas encore de régime d’épargne-retraite à vos employés, vous devrez donc vous pencher sur le sujet d’ici l’entrée en vigueur de cette obligation, qui ne viendra pas avant deux ans suivant la création du RVER (ignorez donc les nombreux appels de ceux qui prétendent que vous devez agir avant le 1er janvier 2014).

Que faire pour le moment ?

Si votre compagnie se trouve dans la mire du RVER, vous devriez amorcer une réflexion sur ce que vous voulez pour vos employés – incluant possiblement vous-même et certains de vos proches – et sur vos besoins comme employeur. Quitte à devoir offrir un programme d’épargne-retraite, pourquoi ne pas considérer toutes les options possibles ?

Tel qu’il se dessine, le RVER se voudra un produit efficace et à faible coût, mais qui restera un produit d’entrée de gamme, commun à des dizaines de milliers d’entreprises. Mais d’autres produits, comme le REER collectif, le Régime de participation différée aux bénéfices (RPDB) ou le Régime de retraite simplifié (RRS), existent depuis longtemps, ont fait leurs preuves et pourraient permettre de mieux atteindre vos objectifs, tout en répondant aux exigences de la Loi – vous évitant ainsi de vous faire imposer le RVER.

Les frais liés à ces régimes collectifs « traditionnels » s’avèrent significativement plus faibles que ceux des produits d’épargne-retraite offerts sur une base individuelle (comme les fonds communs). Selon les caractéristiques de l’entreprise cliente (nombre d’employés participants, niveau des cotisations, etc.), ils peuvent offrir des frais très concurrentiels, voire inférieurs à ceux applicables au RVER. Dans tous les cas, il est possible de faire en sorte que l’employeur ne doive subir aucuns frais pour son programme d’épargne-retraite (hormis ceux liés au personnel l’administrant).

Dans ce contexte, voici quelques exemples parmi les aspects à considérer :

  • De quel niveau d’aide auront besoin vos employés pour comprendre leur régime ? Le soutien offert avec le RVER s’effectuera essentiellement à distance (site web, centre d’appels). Tout service en personne exigera des frais supplémentaires de l’employeur. À l’inverse, les régimes existants mentionnés plus haut incluent des rencontres de spécialistes et autres interventions, et permettent de personnaliser les communications selon les réalités de votre entreprise.
  • Avez-vous des employés ailleurs au Canada ? Il est probable que le RVER s’avère « incompatible » avec ses équivalents des autres provinces, ce qui nécessiterait la mise en place d’un second régime (ou plus) si vous désirez offrir un régime à tous. Un seul régime pancanadien serait alors préférable au RVER.
  • Êtes-vous en forte concurrence avec des compétiteurs pour attirer ou conserver vos employés ? Plusieurs études indiquent que les employés valorisent davantage un régime de retraite qu’une augmentation de salaire. Une participation financière de l’employeur serait alors très bien reçue. Certaines stratégies peuvent être mises en place de manière progressive, remplaçant en partie les augmentations salariales par des cotisations, afin de vous positionner avantageusement face à vos compétiteurs.
  • À l’inverse, avez-vous des employés à bas salaire, comme dans plusieurs secteurs économiques ? Le RVER peut alors être contre-indiqué pour eux, les privant à la retraite de certains revenus des programmes gouvernementaux. Un compte d’épargne libre d’impôts (CELI) collectif pourrait alors se montrer plus approprié.

Pour un choix réfléchi

Plusieurs disent que l’arrivée du RVER pour les PME se résume à une seule décision : choisir l’institution financière qui deviendra son fournisseur. Mais comme démontré ci-dessus, la décision s’avère souvent plus complexe. Assurez-vous de bien mesurer vos besoins et obtenez les conseils d’un véritable spécialiste, pour le plus grand bien collectif de votre entreprise et de vos employés.

Jean-Daniel Côté est vice-président, retraite à ACT Actuaires.