Le Québec aurait intérêt à bonifier le Régime de rentes du Québec (RRQ) à la hauteur des modifications proposées pour le Régime de pensions du Canada (RPC), selon plusieurs des premiers intervenants qui ont pris la parole aux consultations de la Commission des finances publiques.

Rappelons que la Belle province n’a pas signé l’entente avec Ottawa l’été dernier, alors que le ministre Carlos Leitao avait affirmé qu’un travail supplémentaire s’avérait nécessaire pour déterminer la meilleure façon de bonifier le régime québécois.

Lors de la première journée de consultations, mardi, certains ont déploré que la réforme proposée aurait pour effet d’appauvrir les retraités québécois par rapport aux autres Canadiens. Selon le Réseau FADOQ, ces derniers recevraient une rente au moins 12 % supérieure à celles de Québécois.

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Alban D’Amours, qui a présidé le comité sur l’avenir de la retraite, a quant à lui préconisé une bonification similaire à celle du RPC. « Il est maintenant nécessaire de demander aux employeurs de cotiser davantage aux régimes, dit-il. Ceux qui offrent un régime d’épargne-retraite à leurs employés pourront le faire à coût nul en adaptant leur régime privé. Pour les autres, [la bonification du RRQ constitue] une façon très efficace et peu coûteuse de contribuer à l’épargne-retraite de leurs employés. »

Bernard Morency, un membre du comité, a ajouté qu le modèle de réforme proposé par Ottawa « répondrait beaucoup mieux aux besoins de la classe moyenne et des jeunes » que la version québécoise et réduirait le fardeau administratif additionnel que cette dernière imposerait.

Lors de la deuxième journée (mercredi), l’Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite (ACARR) a affirmé qu’il fallait s’attaquer à la problématique du manque d’épargne-retraite des Québécois à revenu moyen qui ne disposent pas de régime d’employeur.

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« Certains de nos membres sont préoccupés par l’impact d’une bonification du RRQ sur les charges sociales des entreprises, a affirmé Pierre Lavigne, directeur de l’ACARR. Plusieurs pourraient toutefois absorber une hausse des coûts en modifiant leur régime de retraite en conséquence. »

En soulignant l’utilité d’une harmonisation de la législation au pays, M. Lavigne a ajouté que les membres reconnaissaient qu’une bonification du régime gouvernemental était positive pour la population québécoise en générale, même si leurs employés ne se trouvaient souvent pas parmi ceux en ayant le plus besoin.

Certains appuient toutefois une approche basée sur des mesures comme le RVER. La Fédération des chambres de commerce du Québec, par exemple, a noté la nécessité de tenir compte de l’écart des taxes sur la masse salariale entre la province et le reste du Canada pour ne pas nuire à la compétitivité des entreprises québécoises.

Le RVER fait aussi partie des mesures prônées par l’Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes (ACCAP). « Nous privilégions une approche ciblée axée sur l’épargne personnelle et une plus grande disponibilité des outils d’épargne comme le RVER », a indiqué Claude Harnois, directeur, Rentes assurées, services actuariels et professionnels à iA Groupe financier.

Selon l’ACCAP, le rôle des régimes publics est d’assurer la sécurité financière des retraités, mais pas de maintenir leur niveau de vie, qui revient à l’épargne personnelle.

Élyse Lemay, avocate, affaires réglementaires, services financiers à la Great-West, a ajouté qu’une hausse trop importante du taux de cotisation des employeurs au RRQ pourrait pousser bon nombre d’entre eux à sabrer dans leurs régimes de soins de santé et d’assurance invalidité. Conséquemment, les employés seraient plus nombreux à dépendre des programmes gouvernementaux « Cela exercerait une pression supplémentaire sur les finances publiques », a-t-elle soutenu.

Le ministre Leitao a tenu à préciser que le gouvernement n’avait pas de « décision prise d’emblée ». « On a ces consultations pour voir s’il y a un consensus. C’est le début du processus, ce n’est pas la fin. »

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Les jeunes « se font avoir »

L’économiste et consultant en politiques publiques Paul Daniel Müller juge que les jeunes générations « se font avoir », rapporte TVA.

Cet ancien président de l’Institut économique de Montréal (IEDM) assure que la réforme proposée par le gouvernement provincial ne réglera pas les problèmes de la génération X (gens nés entre 1966 et 1976) ni Y (nés entre les années 1980 et 2000).

Le problème est que la génération de l’avant-guerre et celle des boomers n’ont pas payé leur juste part, bien qu’ils aient eu accès à tous les services, soutient Paul Daniel Müller.

Si les gouvernements du passé avaient eu assez de sens des responsabilités pour facturer le véritable coût des promesses qu’ils faisaient, le taux de cotisation total (employés et employeurs) serait aujourd’hui d’environ 7,3 % plutôt que de 10,8 % », explique-t-il.

Les rentes pourraient-elles être ajustées à la baisse en fonction de l’augmentation de l’espérance de vie? L’économiste répond que « si cette mesure est appliquée uniquement progressivement, les boomers en seront exemptés, alors que c’est précisément la génération qui a bénéficié le plus de l’augmentation de l’espérance de vie ».

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