À l’aube d’une pandémie mondiale, en février, la Caisse de dépôt et placement du Québec (CPDQ) a allongé 75 millions millions de dollars américains pour racheter la participation restante de 10 % du milliardaire Guy Laliberté dans le Cirque du Soleil, qui s’est placé à l’abri de ses créanciers quelques mois plus tard.

« Le 14 février, jour de la transaction, aucun fait ne validait la possibilité d’une pandémie, et encore moins d’un confinement planétaire sans précédent », a soutenu le nouveau président et chef de la direction du bas de laine des Québécois, Charles Émond, devant les députés de l’Assemblée nationale dans le cadre d’une commission parlementaire, lundi après-midi.

La CDPQ a radié ses investissements évalués à 170 M$ US dans l’entreprise de divertissement. La Caisse avait acquis 10 % de la société en 2015 lorsque M. Laliberté avait décidé de vendre sa participation majoritaire à un trio d’investisseurs qui comptait parmi ses rangs fonds texan TPG Capital et la firme chinoise Fosun.

« La décision a été réfléchie, a expliqué M. Émond. On l’a fait d’une façon prudente, tant d’un point de vue opérationnel que stratégique. Il valait mieux, selon nous, avoir 20 % avec des droits que 10 % et être en arrière sur le banc du passager. »

Avec une participation bonifiée, la Caisse souhaitait que le Cirque « revienne à son cœur de métier et gère sa dette plus prudemment ».

Or, en février, les signes de la pandémie commençaient déjà à se faire sentir. En janvier, le Cirque avait déjà annulé ses représentations du spectacle « Un monde fantastique » à Hangzhou, dans la province chinoise du Zhejiang, en raison des inquiétudes sur la COVID-19, qui commençait alors à se répandre dans le pays.

« Vous avez fait le pari qu’il n’y aurait pas de pandémie? », a lancé le député solidaire Vincent Marissal au grand patron de la CDPQ.

« Il y avait 500 cas de COVID dans le monde en-dehors de la Chine, majoritairement en Asie, a répliqué M. Émond. Beaucoup de gens parlaient d’un épisode comme le SRAS. Le (15) février, ici, on a le Canadien (de Montréal) qui perd 4-3 contre Dallas devant 21 000 personnes (au Centre Bell). »

Privé de revenus depuis la mi-mars parce qu’il avait été contraint à annuler ses 44 spectacles à travers le monde, le Cirque avait licencié quelque 3500 personnes à la fin juin en se tournant vers la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC).

Un groupe de créanciers garantis du Cirque, dirigé par la firme torontoise Catalyst Capital Group, est en voie de prendre le contrôle de la compagnie, ce qui écarterait la CDPQ, TPG Capital et Fosun. Le mois dernier, l’offre des créanciers, évaluée à plus de 1,2 G$ US, a été retenue comme soumission d’amorce, qui fixe les conditions minimales à respecter pour le dépôt d’éventuelles propositions rivales, par le tribunal.

Les parties intéressées ont jusqu’en fin de journée, mardi, pour déposer une proposition rivale, dont la valeur devra être supérieure d’au moins 1,5 M$ US à l’entente intervenue avec les prêteurs du Cirque.