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Le lien santé des employés et santé des organisations est bien réelle. Sans des employés en santé, il est plus difficile pour une entreprise d’assurer une croissance optimale. Parce que la non-santé coûte cher, engloutissant jusqu’à 17% de la masse salariale, sans compter les coûts du présentéisme[1]. L’efficacité des employés – et, de fait, la productivité de l’organisation – dépend donc en partie de leur santé.

Comment favoriser une meilleure santé dans l’organisation ? Dépression, stress, troubles musculosquelettiques, hyperglycémie, surpoids, tabagisme, hypertension, sédentarité, arrivent dans le peloton de tête des facteurs de risques les plus coûteux pour les organisations[2]. Un employé dépressif diminue sa productivité de 7,6%[3] ; un employé obèse voit son risque d’absence multiplié par 4[4] ; un employé peu actif physiquement est 12% moins productif que son collègue actif[5] ; un employé fumeur coûte 3150 $ de plus / an qu’un non-fumeur[6]… En y regardant de plus près, qu’en déduit-on ? Alimentation déséquilibrée, sédentarité, troubles du sommeil, tabagisme, mauvaise gestion du stress tiennent une grande part de responsabilité. « Mieux vaut prévenir que guérir » assène le dicton.

D’un point de vue financier, les études abondent dans ce sens en confirmant le lien entre évitement ou réduction de risques et économies réalisées[7]. De nombreuses entreprises, parmi les plus performantes, les mieux cotées par les employés[8], l’ont bien compris et montrent le chemin, affichant des résultats encourageants : baisse des coûts de santé, de l’invalidité, de l’absentéisme et en parallèle, amélioration du climat de travail, augmentation de la satisfaction des employés, rétention des talents, augmentation de la productivité et retour sur investissement pouvant aller de 1,50$ à 4,00$ par dollar investi[9]. Autre preuve de leur conviction : leur investissement augmente avec le temps, confirmation qu’elles sont convaincues de l’importance et de l’efficacité de ce type de démarche[10]

En étudiant les programmes de prévention santé les plus efficaces, on retrouve plusieurs critères qui semblent être essentiels :

– L’engagement de la haute direction et de chacun des gestionnaires, véritable vecteur de changement de culture organisationnelle, qui peut se traduire de différentes manières : création d’un Comité santé mieux-être, inscription de la prévention santé dans la politique de gestion de l’entreprise… Ces gestes expriment certes la conviction de la direction, mais constituent également un gage de cohérence de l’ensemble des interventions ;

– Un engagement dans la durée : modifier les comportements individuels est un processus qui demande du temps. Une inscription dans la durée permet par ailleurs de rejoindre plus largement les employés, tout en laissant le temps aux individus les moins motivés (souvent les plus à risque) de progresser dans les étapes de changement ;

– L’approche globale de la santé : un mode de vie équilibré repose à la fois sur la santé physique et la santé psychologique, l’un et l’autre étant inter-reliés ; favoriser une meilleure santé au travail passe également par des pratiques de gestion soucieuses de la santé des individus et un environnement propice à adopter de bonnes habitudes de vie ;

– L’adaptation des interventions au « profil santé » des employés : les thèmes des interventions doivent rejoindre la majorité des employés. Mais s’il est important de s’adresser aux employés dans leur ensemble[11], il est tout aussi important d’ajuster le niveau d’intervention au niveau de risque des individus en accompagnant individuellement ceux qui sont le plus à risque, par exemple ;

– La qualité et l’efficacité de l’implantation : un taux élevé de participation semble être un bon indicateur prédictif de succès[12]. Aussi, un programme de prévention santé peut sembler le plus efficace sur papier, si n’y sont pas associées des stratégies visant à mobiliser les employés, ainsi qu’à impliquer les acteurs clés (gestionnaires, représentants des syndicats, chargés à leur tour de motiver les employés), les chances de succès du programme s’en trouvent considérablement amoindries ;

– L’évaluation des interventions : plusieurs indicateurs peuvent être suivis comme la satisfaction des employés, l’évolution des habitudes de vie, du taux d’invalidité… Ils représentent des outils précieux pour éventuellement réajuster les interventions en fonction des objectifs fixés.

Une approche rigoureuse
Ces facteurs de succès démontrent qu’un programme de prévention santé efficace repose sur une approche rigoureuse, soutenue dans le temps, proposant des interventions de qualité et en adéquation avec les besoins. Mais comment procéder pour s’assurer les meilleurs résultats ?

Pour l’analyse des besoins, et comme première intervention, il est préférable d’opter pour un questionnaire intégrant une analyse individuelle des habitudes de vie et un plan d’action personnalisé pour chacun des employés. Ce type de questionnaire a l’avantage de rejoindre, en une seule intervention, à la fois les intérêts de l’organisation et ceux des employés : au-delà d’une simple évaluation des besoins, profil et plans d’action personnalisés permettent d’une part, d’afficher l’engagement de l’organisation et, d’autre part, d’inciter les employés à changer de comportement.

Par ailleurs, un bon questionnaire couvre certes les habitudes de vie individuelles, mais devrait investiguer en parallèle, comme le recommande la Norme « Entreprise en santé », l’environnement de travail, les pratiques de gestion et la conciliation travail-vie personnelle. Il devrait également permettre d’identifier les individus très à risque (santé mentale fragile) pour que leur soit offert un soutien immédiat, sans que la confidentialité des données ne soit brisée. Enfin, qu’il soit passé sur papier ou en ligne, le questionnaire devrait être attaché à une stratégie d’implantation pertinente, élément indispensable pour stimuler la participation qui devrait osciller entre 50 et 70 % (sans cet élément clé, un taux de participation de 1 à 3% est couramment observé).

Concernant les interventions, la sélection se fait naturellement en fonction des besoins identifiés. Il est préférable d’opter pour un programme d’actions plutôt que pour des actions disparates qui auront plus de chance de se solder par des « coups d’épée dans l’eau ». Idéalement, le programme devrait comporter un mélange d’interventions collectives sur le terrain et individuelles (type « accompagnement personnalisé ») pour rejoindre l’ensemble des employés : les employés en santé pour les aider à rester en santé ; les employés qui présentent des facteurs de risque pour les encourager à améliorer leurs habitudes de vie. La réflexion sur l’environnement de travail et les pratiques de gestion devrait être intégrée sous peine de manquer de cohérence globale… et donc de décourager les employés les plus motivés!

Une investissement payant
S’engager dans la prévention et la promotion santé implique certes un réel investissement… mais qui peut être véritablement bénéfique! À condition toutefois de faire les meilleurs choix. Concevoir et mettre en place un programme de prévention santé efficace en milieu de travail constitue en soi un certain défi. Cela exige des compétences pluridisciplinaires et une solide expérience, gages d’un programme efficace… et rentable.

Quand un programme de prévention santé efficace est mis en place…
Le programme Santé et mieux-être implanté chez Visa Desjardins est le seul programme à avoir fait l’objet d’une étude publiée au Québec[13]. Au terme de trois ans, les résultats sont éloquents du point de vue des habitudes de vie des employés :

  • La proportion de participants obtenant un « Score santé » de 75% et plus a doublé passant de 18 à 36% ;
  • Le nombre de fumeur a diminué de 25% ;
  • Le nombre de participants à avoir augmenté leur pratique d’activité physique pour atteindre au moins 30 minutes par jour, cinq jour par semaine ou plus a augmenté de 65% ;
  • Le nombre de participants à avoir augmenté leur consommation de fruits et légumes pour atteindre cinq portions ou plus chaque jour a augmenté de 57%.

Le retour sur investissement, évalué entre 1,50$ et 3$ pour 1$ investi[14], confirme la rentabilité du programme.

Emmanuelle Gaudette est directrice, Santé en milieu de travail pour ACTI-MENU.


[1] Watson Wyatt (Canada), Au travail ! 2000
[2] Partnership for Prevention, Leading by Example 2005
[3] Hemp, P. (2004). « Presenteeism : At work – but out of it ». Harvard Business Review, 82(10), 49-58
[4] L’emploi et le revenu en perspective, février 2009
[5] Santé Canada, 2007
[6] Santé Canada, 2007
[7] University of Michigan Health Management Reserach Center, Cost Benefit Analysis and Report 2006 ; Partnership for Prevention Leading by Examples, 2005
[8] 77 des 100 meilleurs employeurs au Canada ont un programme structuré de prévention et promotion de santé, Enquête Medisys, 2008
[9] Vie active au travail, études commerciales de cas canadiens, Santé publique Canada et Analyse financière de Watson Wyatt pour le programme santé mieux-être de la Fédération des caisses Desjardins du Québec et ACTI-MENU, septembre 2006
[10] Medisys 2008
[11] Sur une année, en l’absence de programme de prévention santé, 2 à 4% des employés passent d’un niveau de risque faible à un niveau de risque élevé ; Bunn WB, Pikelny DB, Paralkar S, Slavin T, Borden S, Allen HM. The burden of allergies-and the capacity of medications to reduce this burden-in a heavy manufacturing environment. J Occup Environ Med. 2003;45(9):941-955
[12] University of Michigan Health Management Reserach Center, Cost Benefit Analysis and Report 2006
[13] The Canadian Journal of Public Health, 2008
[14] Analyse financière réalisée en partenariat avec Watson Wyatt, 2006

* Les opinions et idées exprimées dans cet article sont celles de l’auteur. Elles n’ont pas étés influencés par Avantages, Les éditions Rogers, le commanditaire ou tout autre annonceur associé à ce site.