Le coût des avantages sociaux offerts aux employés est-il devenu inabordable ? 45 % des promoteurs de régime sondés ont répondu par l’affirmative à cette question. « J’ai vu des employeurs faire des changements à leurs régimes, mentionne Eric Nauss, vice-président ajoint, assurance collective à la Standard Life. Il serait donc intéressant de savoir si ceux qui trouvent le coût abordable, soit 55 % des répondants, ont fait des changements ou s’ils vont éventuellement frapper le mur. »

Selon Sophie Ouellet, les employeurs préfèrent que les assureurs appliquent les changements aux règles administratives et de gestion des coûts pour tous leurs clients en même temps. « Dans certains cas, nous avons mis en place des changements pour tous nos clients et les clients ont mentionné préférer cette approche, dit-elle. De cette façon, il est plus facile d’expliquer aux employés que ce changement est une bonne pratique dans le marché et que ce n’est pas seulement eux qui font la modification. »

Le constat est clair : les promoteurs de régime veulent s’attaquer aux coûts des régimes mais ne veulent pas s’attaquer aux sources de ces coûts. « Dans un tel contexte, ils optent pour des solutions faciles et à court terme, constate Mario Clusiau. Il faut s’attaquer aux vraies questions ! »

Au chapitre des changements observés, Jacques Latour, vice-président Ventes, assurances collectives à la Standard Life se réjouit de constater que 42 % des répondants au sondage ont introduit un programme de bien-être des employés à leur régime. « À long terme, la vraie solution est là, affirme-t-il. Il faut éviter que les employés aient besoin de médicaments, autant que possible. »

Médicaments dispendieux

La multiplication des médicaments dispendieux préoccupe aussi beaucoup les professionnels de l’industrie. « C’est un choix de société, indique Sophie Ouellet. L’industrie pharmaceutique va trouver des traitements pour à peu près tout. Si les régimes privés payent pour ces traitements, l’État peut finir par économiser à long terme, comme c’est le cas pour le médicament Sovaldi pour le traitement de l’Hépatite C. Est-ce à nos régimes et aux employés de payer ces médicaments ? Ou est-ce à la société d’assumer ces coûts ? »

Carl Laflamme croit qu’il faut questionner la pertinence de rembourser certains traitements dispendieux. « Quand un médicament qui coûte 200 000 $ ou 300 000 $ prolonge la vie d’une personne de trois à six mois, il faut se questionner, dit-il. En même temps, personne ne va prendre ce genre de décision. »

Y aurait-il moyen d’influencer les prix ?, se demandent les professionnels réunis pour l’occasion. « Il n’y a pas de représentants des assureurs ou tiers payeurs présents à la table de discussion avec ceux qui établissent les prix, admet Sophie Ouellet. De plus, les compagnies pharmaceutiques ne sont pas nécessairement prêtes à baisser les prix ici car cela pourrait avoir un impact au niveau mondial. Il n’y a donc pas de solution facile à court terme à cette problématique. »

La culture québécoise et les structures en place ne facilitent pas la prise de conscience du consommateur sur l’importance des coûts liés à la santé, constatent certains experts. « Aux États-Unis, les gens sont habitués à magasiner pour leurs soins de santé, indique Eric Nauss. Ils sont conscients des coûts. Les Québécois ne sont pas habitués à questionner leur médecin parce qu’ils ne payent pas de façon directe la majeure partie des coûts reliés aux soins de santé. La conscientisation des employés, employeurs, pharmaciens, médecins et autres permettra la mise en place de mesures de gestion des coûts efficaces, assurant ainsi la pérennité des régimes de santé publics et privés au Québec »

Gérer la santé mentale

Seulement 14 % des répondants au sondage indiquent que leurs gestionnaires disposent de tous les outils nécessaires pour gérer adéquatement les problèmes de santé mentale des employés. « J’ai été davantage surprise de constater que 38 % n’ont pas de réponse quand on leur demande comment leurs directeurs gèrent les problèmes de santé mentale qui surviennent au sein du personnel, mentionne Sophie Ouellet. Est-ce parce qu’ils ne savent pas quoi faire avec la santé mentale ? Est-ce par manque d’intérêt ? Ceci laisse transparaître que les gens ne sont pas bien outillés ou qu’ils sont pris au dépourvu avec la santé mentale. »

La santé mentale est pourtant une cause d’absentéisme en constante augmentation. « Nous observons que le nombre d’invalidités à caractère psychologique au Québec est le double du reste du Canada, indique Carl Laflamme. Pour l’ensemble de notre portefeuille du secteur privé, cela représente 40 % des assurances salaires de longue durée, contre 19 % à l’extérieur du Québec. »

L’endettement, la pression au travail et dans la vie privée font parti des déclencheurs croit Carl Laflamme. « C’est un peu décourageant de voir que seulement 16 % des répondants disent qu’ils ont besoin de former leurs directeurs ou superviseurs, ajoute-t-il. Ce sont pourtant les gens en relation constante avec les employés. Chaque organisation va devoir travailler fort pour trouver des solutions, d’autant plus que les récidives sont importantes. »

« Les gens utilisent-ils les outils existants ? », questionne Sophie Ouellet. Les outils sont là, mais comment faire pour que les gestionnaires prennent le temps de suivre ces cours ? », se demande-t-elle.

L’absentéisme varie en fonction de la taille de l’entreprise, fait remarquer Carl Laflamme. « Il y a 7,5 jours d’absence en moyenne dans les entreprises de moins de 20 employés, 9,3 dans les entreprises de 20 à 100 employés, 10,6 dans les entreprises de 100 à 500 employés et 11 dans les entreprises de 500 employés et plus », indique-t-il. « Les grandes entreprises ont un plus grand défi de créer une culture d’appartenance », renchérit Jacques Latour.

Dans ce contexte d’augmentation de l’absentéisme, Philippe Toupin, vice-président, Solutions collectives à la Standard Life, avoue être étonné de constater que les entreprises ne sont pas plus nombreuses à proposer des solutions de type « mieux-être ». « C’est peut-être parce que nous sommes incapables de déterminer précisément le rendement sur le capital investi », dit-il. « Il faut toutefois mettre les choses en perspective, souligne Carl Laflamme. Il y a moyen de mettre en place des programmes de santé et mieux-être économiques en autant qu’il y ait des personnes dédiées pour les promouvoir. Si la haute direction n’y croit pas, cela ne marchera pas ! »

La suite : Enquête du 25e anniversaire : Partie 3

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