La ­BDC a bien compris qu’une stratégie de communication bien rodée lui permettait de tirer profit au maximum de son compte de soins de santé, et plus largement de son régime d’assurance collective. « ­On met beaucoup l’accent sur la communication et la transparence dans l’ensemble de notre offre de rémunération globale, soutient Éric ­Lacroix, directeur, ­Rémunération globale et rendement à la ­BDC. En 2014, nous avons procédé à une revue complète de nos avantages sociaux et entrepris une tournée à travers le ­Canada pour s’assurer que les employés comprenaient bien ce qui leur était offert. »

Concernant plus spécifiquement les comptes de soins de santé, la ­BDC s’assure d’avertir les participants qu’ils doivent utiliser l’argent qui y est contenu s’ils ne veulent pas le perdre. La démarche est particulièrement importante, car le niveau de satisfaction envers le régime peut être fortement ébranlé lorsque les employés réalisent qu’ils ont perdu des sommes, faute de les avoir retirées à temps, note Éric ­Lacroix.

Malgré tout, environ 20 % des sommes versées dans les comptes demeurent inutilisées. « C’est plus que ce que je souhaiterais », ­avoue-t-il.

Puisque le régime d’assurance collective de la ­BDC est de type flexible, l’employeur ne verse pas directement d’argent dans le compte de soins de santé des employés. Elle alloue plutôt un certain nombre de crédits que les employés peuvent utiliser dans six options distinctes. Avec environ 40 % des participants qui y transfèrent des crédits chaque année, le compte de soins de santé est la deuxième option la plus populaire, souligne M. Lacroix. « ­Considérant qu’il s’agit d’une option totalement volontaire, nous estimons qu’il s’agit d’un bon résultat. Si cette ­option-là ne répondait pas aux besoins des employés, elle ne serait pas autant utilisée. »

Dans la majorité des cas, les participants retirent des fonds de leur compte pour payer des soins dentaires non couverts par le régime de base ou encore des services paramédicaux, tels que la massothérapie ou la chiropractie.

Le compte de soins de santé a toutefois de la difficulté à s’imposer face à une option particulièrement alléchante pour les quelque 2 000 employés de la société d’État : la possibilité « d’acheter » avec leurs crédits jusqu’à cinq jours de vacances supplémentaires. Le compte ­mieux-être se classe pour sa part en troisième position. Somme toute, Éric ­Lacroix estime que le compte de soins de santé « sert bien la stratégie de rémunération de l’organisation ».

Des gagnants et des perdants
Les comptes de soins de santé s’inscrivent dans la mouvance des avantages sociaux « à cotisation déterminée », ce qui ne plaît pas à tous. « ­Le partage des risques n’est pas présent dans les comptes de soins de santé. Le fardeau de l’augmentation des coûts incombe aux employés », déplore ­Paul O’Donnell, agent de recherche principal au ­Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP).

Le syndicat ne voit pas de mal à la création d’un compte de soins de santé, tant qu’il s’agit d’un supplément pouvant être utilisé pour payer des soins « style de vie », comme la massothérapie. « ­Mais ça devient un problème quand cela entraîne une réduction des couvertures du régime de base », ­dit-il.

« ­Les jeunes trouvent ça excitant au début de leur carrière, parce qu’ils sont de moins grands consommateurs de soins de santé. Mais en vieillissant, ils réaliseront ­peut-être que la couverture assurée du régime est insuffisante pour répondre à leurs besoins », indique M. O’Donnell. Il ajoute que l’implantation d’un compte de soins de santé peut « causer du tort aux employés qui ont des problèmes de santé préexistants ».

« C’est certain que les grands réclamants sont généralement désavantagés, mais il faut aussi penser aux trois quarts des employés qui réclament moins que le montant de la prime. Le compte de soins de santé vient donner une flexibilité supplémentaire à ces ­employés-là qui consomment peu de médicaments, mais qui veulent avoir accès à d’autres types de soins », explique ­Charles-Antoine ­Villeneuve, associé, santé et assurance collective chez ­Morneau ­Shepell, qui rappelle qu’au ­Québec, la loi impose un montant maximum que les employés peuvent débourser de leur poche en médicaments chaque année, qu’ils bénéficient d’un compte de soins de santé ou non.

La satisfaction en question
Malgré certaines réticences des milieux syndicaux, les données du sondage ­Sanofi ­Canada révèlent que les participants qui disposent d’un compte de soins de santé sont plus portés à décrire la qualité de leur régime comme étant excellente ou très bonne (55 %, comparativement à 45 % chez ceux qui n’en ont pas).

« ­Dans les régimes traditionnels, les hausses de coûts pour l’employeur ne sont pas toujours connues des employés. Dans un régime flexible ou un compte de soins de santé, la hausse des crédits alloués, et donc de la rémunération globale, est clairement visible, ce qui contribue à l’appréciation du régime », mentionne ­Nancy ­Lafrance, ­vice-présidente régionale, ­Ventes, ­Assurance collective à ­SSQ ­Groupe financier.

Comme les employés cherchent à maximiser les sommes allouées par leur employeur, les comptes de soins de santé peuvent aussi les sensibiliser à devenir des consommateurs de soins de santé plus avertis, ­ajoute-t-elle.

Attention, cependant. Si un employeur réduit grandement les couvertures de base du régime, mais ne verse qu’une petite somme d’argent dans le compte de soins de santé, ce dernier ne permettra certainement pas de gonfler la satisfaction des employés. « ­Si l’objectif d’un employeur est de réduire le budget alloué à l’assurance collective, il doit faire preuve de transparence et le dire aux employés, prévient ­Nancy ­Lafrance. Il ne peut pas essayer de camoufler ça derrière un compte de soins de santé.

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