Le ministre des Affaires municipales, Pierre Moreau, a été hué par des employés municipaux, mercredi, lorsqu’il a insisté sur l’importance que les déficits passés des régimes de retraite soient épongés.

M. Moreau a pris la parole devant eux lors d’une manifestation rassemblant des milliers de cols bleus, de policiers et pompiers travaillant dans les villes québécoises. La Coalition syndicale pour la libre négociation, qui avait organisé l’événement devant l’Assemblée nationale, est opposée à l’intention du gouvernement de légiférer dans ce dossier.

En s’adressant aux syndiqués, M. Moreau a néanmoins répété qu’il présentera un projet de loi afin de baliser la négociation entre les municipalités et leurs employés.

La coalition, qui représente plus de 90 % des employés municipaux québécois, s’oppose à toute législation qui obligerait un partage avec les municipalités des déficits passés à parts égales. Les syndiqués sont d’accord pour stabiliser les régimes de retraite pour les situations présentes et futures, mais misent sur une amélioration des rendements des marchés pour effacer les déficits passés.

Des intentions claires

Sur une estrade installée devant le parlement, aux côtés des chefs syndicaux, M. Moreau leur a cependant clairement indiqué ses intentions, ce qui lui a valu d’être hué par les manifestants. « Il y a une chose qui est certaine, c’est que la question des régimes de retraite doit faire l’objet d’un règlement, a-t-il dit. Et ça, ça touche le passé, ça touche le futur, pour assurer la pérennité des régimes. »

Lors d’un point de presse qui a suivi, M. Moreau a évoqué la possibilité d’obliger les parties patronales et syndicales à s’entendre sur les déficits passés. « On va devoir trouver un mécanisme pour que le passé soit réglé comme l’avenir », a-t-il dit.

Le PQ veut protéger les retraités

Le porte-parole de l’opposition officielle en matière de travail et de régimes de retraite, Alain Therrien, croit quant à lui que le gouvernement Couillard ne doit pas toucher à l’argent des retraités.« Il faut à tout prix protéger le pouvoir d’achat des hommes et des femmes qui ont bâti le Québec. Le gouvernement doit cesser de laisser planer le doute quant au partage 50‑50 des déficits passés. Le ministre doit s’engager à ne pas toucher à la rente des retraités du Québec. Le projet déposé par le gouvernement du Parti Québécois prévoyait que la rente de base consentie aux retraités ne pouvait être réduite, a-t-il affirmé par voie de communiqué. Il faut cesser de faire subsister l’inquiétude chez nos retraités. Le gouvernement doit s’engager à tout mettre en œuvre pour favoriser les négociations dans le dossier des déficits des régimes de retraite municipaux. Il doit être responsable et s’engager à ne pas créer de déséquilibre dans les rapports entre les parties en octroyant un pouvoir de décréter ».

Pour lui, le projet de loi proposé par le PQ quant à la restructuration des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal était une solution aux problèmes décelés par le rapport d’Amours. C’est pourquoi le PQ étudiera attentivement le projet de loi que déposera le gouvernement libéral, explique-t-il. « Nous analyserons attentivement le projet de loi qui doit être déposé prochainement par le gouvernement libéral. Le Parti Québécois veillera à assurer la protection des travailleurs et des retraités municipaux ainsi que celle des contribuables du Québec. Nous nous assurerons également de la présence du concept de transparence économique, essentielle à une saine négociation dans un dossier aussi important », conclu Alain Therrien.

Québec solidaire s’inquiète

Devant l’intention de Pierre Moreau de déposer un projet de loi sur les régimes de retraite, Québec solidaire se dit inquiet de constater que le ministre des Affaires municipales semble vouloir régler lui-même le déficit des régimes de retraite. « Les déficits passés des régimes de retraite ont en grande partie été causés par les congés de cotisation que se sont octroyés plusieurs villes et municipalités par manque de prévoyance. Les retraites font partie intégrante des conditions de travail négociées par le passé; revenir sur ces conventions collectives signifierait renier la signature des villes et municipalités », croit le député de Mercier, Amir Khadir.

«Le gouvernement créerait une crise de toutes pièces en entravant la liberté de négociation ou en reniant les conventions collectives du passé. Les dernières années ont vu les déficits des caisses de retraite fondre comme neige au soleil et le problème a perdu de son urgence. Brimer des droits par électoralisme ou par aveuglement idéologique serait une grave erreur. Les récents exemples des cols bleus de Québec et de Montréal démontrent que la négociation peut donner des résultats favorables aux employeurs, aux employé-es et aux citoyens-nes», ajoute, Amir Khadir.

Une autre manifestation

La coalition compte organiser une autre manifestation jeudi matin, aux assises annuelles de l’UMQ, qui ont lieu à Gatineau. Les membres de la coalition demanderont aux élus municipaux du Québec de régler les défis des régimes de retraite par la négociation, sans attendre l’adoption éventuelle d’une loi à l’Assemblée nationale.