Alors que les gouvernements multiplient les allègements fiscaux pour inciter les travailleurs âgés à demeurer actif plus longtemps sur le marché du travail, les employeurs, eux semblent peu intéressés par leurs candidatures. Et ce, malgré la pénurie de main-d’œuvre qui sévit au Québec.

Bien que le taux d’activité des 55 ans et plus augmente, de nombreux travailleurs d’expérience qui sont toujours motivés à travailler se heurtent encore à des portes closes dans leur processus de recherche d’emploi.

Rencontrée par Le Devoir, Hélène Barnard, 61 ans, affirme n’avoir eu aucune offre d’emploi malgré une soixantaine de CV envoyés et plusieurs convocations en entrevue. « Ce qu’on entend, ce qu’on lit, ce n’est pas la réalité. Les employeurs ne veulent plus de nous. C’est ce que je ressens », a-t-elle dit au quotidien.

L’entrepreneure Julie Dufresne, qui a fondé le site web Emploiretraite.ca, fait le même constat et estime que les entreprises gagneraient à « ouvrir leurs horizons ». « Si Emploiretraite.ca fonctionne, c’est en partie parce qu’il y a une problématique et qu’il y a peut-être un peu d’âgisme au Québec », dit-elle. Emploiretraite.ca est une plateforme lancée il y a deux ans qui met en relation les chercheurs d’emploi de 50 ans et plus et les employeurs qui ont des postes à combler.

Des emplois de moins bonne qualité

Des données de l’Institut de la statistique du Québec (ISQ) montrent que les personnes de 55 ans et plus sont moins nombreuses que celles des autres groupes d’âge à occuper un poste de « qualité élevé », c’est-à-dire un poste stable, à qualification élevée, payé au moins 15 $ l’heure, à temps plein, ou à temps partiel volontaire.

Toujours au Devoir, Mia Homsy, la directrice de l’ISQ, a indiqué recevoir « beaucoup de témoignages de personnes de 60 ans et plus qui veulent travailler, mais qui disent qu’il n’y a pas de place pour elles sur le marché du travail. »

En entrevue à Avantages il y a deux ans, la professeure titulaire à HEC Montréal Sylvie St-Onge, affirmait que conserver, attirer et mobiliser les travailleurs âgés était une préoccupation assez récente pour les entreprises. Dans une étude qu’elle a réalisée sur le sujet, plusieurs employeurs admettaient même être heureux lorsque des employés âgés partaient à la retraite.

Les mentalités évoluent

S’il est vrai que certains employeurs boudent encore les travailleurs d’expérience, la situation tend à changer depuis quelques années, assure pour sa part Manon Poirier, directrice générale de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés.

Les employeurs, dit-elle, devront notamment se montrer plus flexibles, en autorisant les employés âgés à avoir des heures de travail réduites ou encore un horaire atypique.

La semaine dernière, le gouvernement du Québec a annoncé dans son budget qu’il abaissait d’un an, soit à 60 ans, l’âge d’admissibilité au crédit d’impôt non remboursable pour les travailleurs d’expériences. La baisse d’impôt maximale est de 1500 $ pour un employé de 60 ans et varie de 150 $ à 1050 $ pour ceux âgés de 61 à 64 ans.

Le budget prévoit aussi, pour les PME, une diminution des cotisations sur la masse salariale pouvant atteindre un maximum de 1250 $ pour les travailleurs de 60 à 64 ans et un plafond de 1875 $ pour les employés de plus de 65 ans.