Yves Bonneau

Le régime volontaire d’épargne-retraite (RVER) – la version québécoise des régimes de pension agréés collectifs (RPAC-PRPP) du ROC – est le nouvel instrument de placement collectif pour la retraite qui entrera en vigueur le 1er janvier 2013. À ce jour, seul le Québec a emprunté cette voie, devenant ainsi le leader canadien en la matière. L’Ontario n’y croit pas du tout et conteste aujourd’hui l’initiative fédérale. Le Québec a déjà une longueur d’avance sur les autres provinces en matière de gestion de programmes en parallèle avec ceux du fédéral., la Régie des rentes du Québec (RRQ) et son gestionnaire, la Caisse de dépôt, étant l’illustration parfaite de cette autonomie et de ce leadership québécois dans ce domaine. C’est pourquoi cette offre venant du fédéral a séduit d’emblée le gouvernement québécois. Bien sûr, tout l’encadrement législatif reste à déterminer, mais le gouvernement s’y affaire actuellement.

Entretemps, l’industrie a un travail colossal à faire. Rencontrés sur le terrain, de nombreux conseillers en placement spécialisés en collectif n’ont que vaguement entendu parler du RVER, certains ignorant même son existence. Les dirigeants de PME, leurs employés, de même que les travailleurs autonomes à qui s’adressent principalement les RVER ne sont guère plus au courant de ce qui s’en vient à ce sujet et de l’obligation de toutes les entreprises de cinq employés et plus d’offrir un RVER à leurs employés au plus tard le 1er janvier 2015.

Québec souhaite que l’initiative favorise une solution simple, accessible et peu coûteuse. Déjà, des voix se sont élevées pour critiquer l’initiative singulière du Québec qui se détache complètement des RPAC proposés par le fédéral. D’aucuns la jugent trop décalée, ce qui entraînera pour les gestionnaires des ajustements dans l’administration de tous ces régimes de retraite disparates, causant évidemment un fardeau administratif supplémentaire qui devra être récupéré en frais de gestion plus élevés. Ce sont des exemples comme celui-ci qui font dire à d’autres critiques du RVER, comme Claude Castonguay, que l’administration de ce nouveau régime aurait dû être confiée à la RRQ pour s’assurer que les frais de gestion soient les plus faibles possible, sachant que l’organisme d’État possède déjà toute la mécanique nécessaire pour gérer d’importantes sommes provenant de régimes de retraite et ainsi réaliser des économies d’échelle au profit des participants. Le RVER ayant la particularité d’être « volontaire », contrairement à d’autres régimes de retraite complémentaires comme le modèle australien, il faudra donc convaincre le plus grand nombre de cotisants possibles d’y adhérer pour en assurer la pérennité.

Pour l’heure, les institutions financières ne semblent pas s’inquiéter de ces critiques et en sont à concocter des programmes pour aider leurs clients à bien comprendre les tenants et aboutissants du RVER. Néanmoins, il faudra aller plus loin : communiquer davantage avec la base et la clientèle pour les informer des possibilités du RVER et aussi de ses limites. À titre d’exemple, le niveau de cotisation étonnamment faible (4 %) proposé par Québec. Sachant que pour conserver 60 % de ses revenus d’emploi à la retraite, un employé gagnant 35 000 $ par année doit économiser durant 35 ans environ 7 % de son salaire, il y aura un énorme travail de terrain à faire pour bien conseiller la clientèle potentielle des RVER. À ce chapitre, les gestionnaires de ressources humaines auront également la responsabilité de bien informer les employés de leur entreprise avec de bons outils.

Comme ce sont les employeurs qui choisiront le gestionnaire du régime (sans être tenu d’y contribuer), les promoteurs qui auront pris une longueur d’avance auprès de leur clientèle existante, auprès des intermédiaires dans leurs réseaux de distribution rattachés ou non, et auprès des dirigeants de PME, auront bien sûr le haut du pavé quand viendra le temps de proposer leurs services de gestion. Pour le moment, le potentiel est alléchant. Encore faut-il que les promoteurs capitalisent sur cette promesse par leur offre concurrentielle de services!


Yves Bonneau